Pour une équipe de NBA comme pour une entreprise, l’appréhension des changements de règles ou d'environnement dans un monde en mutation est un élément fondamental de la performance. Pourtant, on constate que les organisations mettent parfois un temps considérable à s'adapter et modifier leurs approches. Ce phénomène est d'autant plus frappant lorsqu'il est avéré qu'elles peuvent leur conférer un avantage comparatif déterminant sur leurs concurrents.
Le temps de réaction des équipes de NBA à la mise en place de la règle des tirs à trois points en est un exemple éloquent. En effet, il met particulièrement bien en évidence les principales barrières du changement. Dès lors, comment tirer parti de cette analyse pour réagir rapidement et piloter efficacement votre transformation digitale ?
Les tirs à trois points : une innovation tardivement exploitée
En 1979, la NBA décida de créer une ligne de tirs à trois points sur tous les parquets américains. Seulement, pendant les cinq saisons qui suivirent, les joueurs ne s’exercèrent pas au lancer longue distance. Les stratégies de jeu demeurèrent aussi quasiment inchangées. Ainsi, ils représentaient moins de 3% des tentatives pour un taux de succès à peine supérieur à 25%, soit 0,76 points marqués en moyenne, contre 0,99 pour un tir à deux points.
Il fallut finalement attendre la saison 1990-1991 pour que l’opportunité des tirs à trois points soit clairement identifiée par les staffs. Le nombre moyen de points marqués dépassa alors logiquement celui des tirs à deux points.
La lenteur fascinante de cette prise de conscience est encore plus flagrante si l’on s’attache aux zones de lancers. En effet, la stratégie d’arbitrage naturelle qui consiste à privilégier aux tirs à deux points situés à mi-distance du panier (plus difficiles à rentrer) les tirs à trois points ou les tirs à deux points courte-distance (avec un nombre de points marqué supérieur en moyenne) fut adoptée très tardivement. On observait encore 10% de tirs à trois points pour 40% de tirs mi-distance sur les parquets 17 ans après la création de la règle.
La statistique s’est complètement inversée depuis. L’intégration de l’avantage comparatif de la valorisation des tirs à trois points et à deux points courte-distance a d’ailleurs donné des résultats spectaculaires. Aujourd'hui, la différence du nombre de points moyen marqués entre un tir à trois points et un tir à deux points est passée sous les 4%.
Malgré ce précédent, ce retard significatif dans la conduite du changement tend à persister. Il est par exemple encore notable dans l’évaluation des bénéfices des rebonds offensifs. Actuellement délaissés par les coaches pour privilégier la sécurisation de leur défense, ils pourraient en fait constituer un autre avantage comparatif déterminant.
Les biais de la tentation latente de l’immobilisme
Cette apathie peut paraître surprenante a posteriori dans un sport aussi populaire et médiatisé que le basketball. Toutefois, la lenteur de l’adaptation aux changements de règles trouve sa source dans des biais récurrents similaires en entreprise. Ces derniers constituent des barrières majeures au changement et entravent la prise de décision. En voici quelques exemples.
Une des premières sources d’immobilisme réside dans un biais d’aversion à la perte. Il s'agit de l’idée selon laquelle l’implémentation d’une stratégie nouvelle créera finalement plus d’inconvénients que de bénéfices. De fait, face à la pression médiatique, des fans et des actionnaires, l’inaction est souvent jugée beaucoup plus sage par un coach soucieux de conserver sa place.
Ce biais s’associe logiquement à une tendance à privilégier le statu quo plutôt que l’innovation. En effet, si la théorie économique classique suppose que chaque décisionnaire choisit d’adopter la solution qui maximisera ses bénéfices, les recherches montrent paradoxalement une certaine appétence, guidée par la sagesse collective, à appliquer des stratégies déjà éprouvées, même lorsque des alternatives plus profitables existent.
Enfin, le conflit du temps dans une stratégie de conduite du changement peut lui aussi pousser in fine à l’immobilisme. En effet, un coach de NBA comme un décisionnaire sont souvent tenus de faire leurs preuves en obtenant des résultats concluants à court terme. A l'inverse, la mise en œuvre de nouveaux processus demande patience et longueur de temps. On notera effectivement à ce sujet que les coaches de NBA passent en moyenne deux ans et demi sur le banc. De même, l’instabilité des postes de direction peut se révéler problématique pour développer une vision à long terme.
Les clés de l'adaptation et d’une transformation digitale réussie
Il est d’abord vital d’évaluer les sources d’avantages comparatifs issues de l’apparition d’un changement ou d’une réglementation. Cette analyse vous permettra ensuite d'établir une réponse cohérente et efficace au nouveau problème posé. Pour ce faire, il est essentiel de déterminer vos insuffisances potentielles et de repenser vos processus pour en faire des forces.
L’alignement organisationnel doit également être une priorité. Il assurera l’adéquation de vos activités aux avantages comparatifs définis précédemment.
L'apprentissage et l'amélioration continue sont clés pour faire face à des changements rapides et optimiser ses stratégies et ses processus. Persévérer dans son avantage compétitif tout en s’adaptant aux nouvelles évolutions permet de réconcilier approches à court et long terme.
Enfin, pour ne pas tomber dans le piège du biais d’aversion à la perte ou du statu quo, l’analyse de la prise de décision doit porter en priorité sur la valeur ajoutée apportée par un processus et dépasser les barrières psychologiques d’une vision court-termiste.
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Sources : StoryShaper, Sports Reference LLC, " NBA League Averages-Per Game," Basketball-Reference.com-Pro Basketball Statistics and History, www.basketball-reference.com, August 2021., www.nba.com/stats., Tobias J. Moskowitz and L. Jon Wertheim, Scorecasting: The Hidden Influences Behind How Sports Are Played and Games Are Won (New York: Crown Archetype, 2011), 47-51, Ilana Ritov and Jonathan Baron, “Status-Quo and Omission Biases,” Journal of Risk and Uncertainty, Vol. 5, No. 1, September 1992, 49-61, FiveThirtyEight, RealGM.